Les billets de l’oncle Bernard

Gabriel, l’Archange, appelle à l’aide

Ce jeudi 19 mars au matin, n’est-ce pas lui, Gabriel, qui a réveillé Joseph de Nazareth, après lui avoir insufflé un énorme message en son cœur. Jeudi prochain, nous l’entendrons converser avec Marie, également de Nazareth : ce sera pour lui confier une mission que beaucoup qualifieraient « d’impossible ».

A présent son standard surchauffe. Ne doit-il pas transmettre à des myriades de personnes qui se sentent seules ou désemparées, une parole lumineuse, quelques notes joyeuses, des raisons d’aimer et d’être aimé et le goût de communiquer.

Gabriel, le Bon Archange, est discret, il n’ose pas demander de l’aide, mais il y a urgence. Les personnes seules sont des myriades : nos aînés, tant de malades, les résidents des Ehpad et ceux qui séjournent à l’hôpital. Mais aussi les personnes qui broient du noir parce que leur commerce périclite … et tant d’autres … !

Il y a urgence : prenez votre téléphone, ouvrez votre ordinateur, utilisez votre portable… Envoyez un SMS, un @mail, un petit coup de fil … c’est pas grand-chose, et souvent pour la personne qui le reçoit c’est énorme. Vous aimez le soleil : ce sera un rayon de soleil dans la journée de celle ou celui qui recevra votre envoi ou qui entendra votre voix.

Voilà qui soulagera Gabriel : déjà, il vous en remercie.


Printemps

Il est des printemps précoces qui voient éclore toutes choses à une vitesse extraordinaire : pensées, violettes, pervenches, forsythia, tulipes et autres. Les arbres bourgeonnent, les nids se construisent. Et quand le soleil est au rendez-vous, c’est un régal. Les petits prédateurs sont là également : insectes utiles ou dangereux, mulots, virus et bactéries s’en donnent à cœur joie.

L’homme, dans son insouciance, se prélasse au soleil et se prend à rêver. Il veut vivre et peut même devenir un peu poète.

Et voilà que tout à coup tout s’arrête … les boutiques, les écoles et les facs, les entreprises, les compétitions et les cinémas. Même les églises demeurées ouvertes n’ont plus de célébrations. Parcs et jardins sont désormais fermés. Quelle est donc cette énorme panne ? A présent, un stress silencieux plane sur la ville. L’ennemi est partout et nul ne le voit. On ne compte plus les personnes atteintes.

Cette année, nul ne verra le grand prunus blanc du Jardin des Plantes, gigantesque boule blanche couverte de fleurs immaculées.

Mais il nous faut mieux regarder !

Nous voyons une armée de blouses blanches, femmes et hommes discrets et efficaces, harassés de travail, donnés à l’accueil et aux soins. Nous voyons des familles attentives les unes aux autres, des enseignants reliés à leurs élèves par internet, des voisins attentifs aux personnes isolées ou en difficulté…. Et tant d’autres choses aussi discrètes qu’admirables.

Aujourd’hui, ce vendredi 20 mars est un nouveau printemps, pas seulement dans le calendrier, mais d’abord dans le cœur de beaucoup.


Écouter le silence

Cette nuit le silence m’a réveillé ! Ni musique, ni chants, ni tamtams et autres dans les brasseries et cafés voisins. La rue Monge était silencieuse, ni bus, ni voitures à ce moment-là ; tout juste l’alternance des feux rouges et verts au carrefour Daubenton, mais ils avaient l’air de travailler en vain. Ce matin, du coup, je ne me suis pas réveillé de bonne heure.

Etranges rues du quartier où l’on entend tout juste le crissement des pneus d’un vélo. Je me demande où je suis alors que je marche en ces lieux que je connais. Peut-être me suffirait-il d’écouter le silence.

Certains soirs d’été nous l’avons écouter en montagne, allongés sur l’herbe en regardant les étoiles. Alors, il n’y avait pas à fuir pour retrouver le bruit. Nous étions là, prenant conscience de notre présence dans l’infini de l’univers.

Le silence du quartier me fait redécouvrir la présence des uns et des autres dans chaque immeuble, à chaque étage, derrière chaque fenêtre. Là, une famille, une personne seule, âgée ou jeune, des enfants endormis, des adultes qui veillent.

Et Dieu dans ce silence est présent, lui qui est la Parole et qui a créé le silence pour que nous puissions écouter : l’écouter Lui, la Parole, et tousses enfants.


Pont d’Austerlitz

Le courant est rapide et les remous impressionnants. La Seine qui baigne Paris entoure l’île de la Cité où se dresse fière et blessée la cathédrale, Notre Dame qui veille sur la ville.

Sur le pont d’Austerlitz où je suis, une ambulance roule à pleine vitesse, puis par le boulevard de l’Hôpital, fonce vers la Pitié- Salpetrière. Un malade et une équipe de soignants n’ont pas une minute à perdre. La sirène du véhicule nous le rappelle.

Dans un autre hôpital parisien, un ami est entré hier en urgence : de suite il a été intubé. Son épouse est inquiète. Nous le sommes avec elle. Des milliers de malades et de familles connaissent ces moments difficiles, pour ne pas dire tragiques. Avec eux tous, nous nous demandons ce que peut bien être l’Espérance.

Les équipes médicales, les chercheurs, les services de sécurité et tant d’autres mettent tout en œuvre, par delà leur fatigue et les plus grands risques, pour éteindre l’épidémie et sauver le plus grand nombre de malades.

N’est-ce pas cela l’Espérance : « Faire nous-mêmes tout ce que nous pouvons faire, et en même temps tout attendre de Dieu. » Autour de nous et partout dans le monde tant et tant de personnes et d’institutions médicales, cherchent, travaillent, agissent, soutenues par les opinions publiques. En même temps les croyants de toutes les confessions se joignent concrètement à l’action, selon leurs possibilités, tout en se tournant vers le Seigneur Dieu notre Père, dans la prière, parfois dans les pleurs et toujours dans la confiance.

Blessée mais debout la cathédrale dresse ses tours au dessus de Paris. Notre Dame, la Vierge Marie, continue de veiller sur Paris.


Mon Hibiscus

Il est le résultat de 4 boutures réparties sur 15 ans. Il y a eu des sécheresses, des gelées, des misères. Cette arrière – arrière petite fille du premier plan acheté mesure 2 mètres de haut.  Une belle fleuraison nous a enchantés il y a deux mois, puis rien. Hier deux superbes fleurs, d’un beau rouge, chacune mesurant entre 12 et 15 centimètres de diamètre se sont épanouies. C’est un plaisir pour les yeux et, si on a un cœur, pour lui aussi !

Mais peut-être suis-je comme Jonas, le prophète, lui qui s’est ému pour un petit ricin qui avait poussé en une nuit !

Car aujourd’hui, ce sont des dizaines de milliers de malades qui nous inquiètent et nous émeuvent. Ce sont aussi les familles, les soignants, les personnes sans abri et sans ressources et tant d’autres pour qui nous sommes en souci.

Et pourtant mon hibiscus me dit quelque chose pour aujourd’hui : « Regarde, il n’y a pas que les fleurs de corona qui ont voix au chapitre aujourd’hui. Fragiles, oui, mais si nombreuses autour de nous si nous savons voir, elles sont et seront à la première place. »

Alors, regardons, découvrons, mettons en valeur tout ce qui est beau dans l’action de chacun, dans le cœur et la délicatesse efficace de tant et tant tout autour de nous. C’est cela qui nous fera découvrir que la lumière et la fraternité sont vraiment présents, tout comme l’amour dans le cœur du Bien-Aimé.


« Restez chez vous » … ‘Chez moi, c’est la rue !’ 

           Nous avons vu ce court reportage aux infos il y a 48 heures, et ce n’était pas une blague ! Un bref dialogue entre un policier et un homme sans domicile. Aujourd’hui, chez nous dans Paris et ailleurs, combien de milliers de personnes peuvent répondre ainsi ! Et ces réponses peuvent être dites en français par des concitoyens et aussi en  beaucoup d’autres langues.

Certes, nous pouvons sourire et trouver que la vie est cocasse, puis passer à autre chose. En revanche celui qui a dit : « Chez moi, c’est la rue… » lui, ne peut pas passer à autre chose. Cette nuit et les suivantes, ce sera la rue, et de même dans la journée. En cette fin mars, les nuits sont froides.

Auparavant beaucoup savaient où faire la manche, trouver une association ouverte, voire une bibliothèque ou un lieu public accueillant. Aujourd’hui que reste-t-il, y compris pour  – non pas se chauffer – mais ne pas avoir froid tout simplement. Mais il s’agit aussi de trouver des toilettes et de quoi se nourrir.

Aussi, avec l’appui de la Mairie de Paris, des associations ont relevé le défi. Dans plusieurs lieux, des sacs repas sont préparés. Des groupes viennent les chercher et les distribuent dans un certains points de la Capitale. Par exemple, des paroisses se sont mobilisées pour rassembler une équipe de bénévoles et réaliser cette distribution. Ainsi à Saint Médard, sur le parvis, c’est tous les jours à midi… par chance, ces jours-ci c’est en plein soleil !

Puisse le soleil d’un partage vrai et d’une solidarité fraternelle réchauffer le corps, la vie et le cœur des uns et des autres. Il y a là quelque chose de l’Evangile.


70 ans, 80…. et plus !

            Ils sont trop bons avec nous, nous les vieux de la vieille ! « Non, non, ne te fatigue pas, ne prends pas de risque, reste bien chez toi… et puis, tu sais à ton âge … ! » Notez que nous avons de la chance : on ne nous dit pas « tu as déjà un pied dans la tombe… » et pourquoi pas, ‘bientôt le deuxième’.

Tout cela est pourtant vrai et nous amène à une certaine humilité. Oui, nos forces ont en partie déserté ; oui, nous sommes plus fragiles et moins rapides ; oui, il est plutôt mieux que nous n’encombrions pas les circuits médicaux déjà surchargés ; et tant d’autres choses évidentes. Mais alors, quelle est donc notre place en ce temps de pandémie ?

Les réseaux  de communication s’affolent, le calme extérieur et la résignation de tant de personnes qui font des queues de plusieurs dizaines de mètres à l’entrée de magasins laissent deviner un grand malaise largement compréhensible. Au milieu d’attitudes superbes d’autres réactions traduisent ce qui est trop lourd aujourd’hui et que certains ne supportent déjà plus.

Il me semble que la place des aînés de notre société, et tout d’abord dans les familles, les communautés ou les associations, est du côté du calme et de la paix. Je ne dis pas de la résignation, car nous n’avons pas à nous résigner. C’est toute la société qui lutte contre le Covid 19, et les aînés luttent pareillement.

Sans discours ni trompette, il y a des « catalyseurs » d’entente et de cohésion, d’espérance calme et paisible, d’ouverture aux autres quels qu’ils soient. La place des aînés est de ce côté-là. Et si ce sont des femmes et des hommes de foi, ils prendront le temps, avec Marie, de puiser tout cela dans le cœur de Dieu notre Père.


Portes cochères

Ces grandes portes sont nombreuses dans notre quartier. Dans les siècles passés elles s’ouvraient à deux battants et laissaient entrer les carrioles qui stationnaient dans la cour. Aujourd’hui la plupart demeurent fermées et ne s’ouvrent que pour laisser passer des piétons.

Tout à l’heure pour me délasser, éviter les crampes et faire fonctionner cœur et artères, je marchais au soleil dans l’un de ces boulevards. De petits bruits familiers me parvenaient : des ploc, ploc – on dirait une balle de ping pong, un boum tout doux : serait-ce un petit ballon mousse lancé sur un mur, un murmure comme un zéphir : peut-être un volant de badminton ? Ne seraient-ce pas des enfants qui jouent ? Mais, au fait, dans cet immeuble, je les connais, je leur ai même fait le caté ! Anatole, Zoé, Julie, Pauline. A leur étage, toute la journée, les ordinateurs et les tablettes chauffent, pour les écoliers, les collégiens, mais aussi pour la professeure et l’ingénieur. Il faut bien trouver des temps de refroidissement des machines et des cerveaux.

 Dans cette maison habitent trois familles qui se sont arrangées pour un roulement des horaires de jeu des enfants dans la cour. Ce fichu covid19 favoriserait-il l’entente et les relations dont les enfants seraient les ambassadeurs et les parents, les sages réalisateurs ?

Ce temps d’épreuve du confinement ne serait-il pas propice à l’humanisation de notre ville et de nos maisons. Ce n’est pas pour rien que Jésus a vécu 30 ans à Nazareth, tout simplement, en aimant son village et sa région, sa maison et ses voisins : cela doit avoir un sens pour nous aujourd’hui.


Téléphone

Ah ! Quel sale engin, on ne peut jamais être tranquille ! Eh non ! Quel outil merveilleux, il nous permet des relations si rapides ! Par les temps qui courent, il faut canoniser ses inventeurs, même s’ils ont mis l’Archange Gabriel, le porteur de bonnes nouvelles, au chômage.

Nous avons vu les téléphones des tranchées de 14-18, avec manivelles pour produire du courant, et les kilomètres de fil. Enfant, je voyais encore des opératrices brancher et débrancher des fiches pour obtenir un numéro, et pas seulement le 22 à Asnières. Aujourd’hui, ce sont de petites merveilles de technologie dont nous nous servons à tout bout de champ sans en connaître les secrets internes. Ils nous mettent en relation avec le monde entier et, par les temps qui courent, avec nos voisins les plus proches ou la famille éloignée. Et je ne parle pas des appels d’urgence ou des demandes de renseignements, de nouvelles dans les hôpitaux et ailleurs. Certes, les différents opérateurs voient leur chiffre d’affaire grimper, mais ils risquent de connaître des problèmes de saturation des réseaux.

Revenons à notre Archange Gabriel : que peut-il penser de sa mise au chômage ? Lui, comme nous, se souvient que Jésus nous a demandé avec insistance de nous aimer les uns les autres comme il nous a aimés. Comment faire quand nous sommes coupés les uns des autres. Une pensée qui s’envole et n’atterrit nulle part, ce n’est guère utile ! Mais une prière qui monte vers le ciel et qui redescend par téléphone, ce n’est pas de la gymnastique acrobatique, c’est aujourd’hui le quotidien de la vie des croyants.

Aimer n’est pas une pensée vague qui s’évapore quand on souffle dessus. Aimer demande des moyens : ils sont tellement nombreux, aussi, mettons-les en œuvre !  Sortir de sa bulle, prendre et donner des nouvelles, accueillir les soucis, les joies, les détails de la vie… cela n’a rien de compliqué, et c’est tellement important. Il s’agit d’exister les uns pour les autres car il est terrible d’avoir le sentiment de n’exister pour personne. Oui, nous avons du prix les uns pour les autres : aussi est-il tellement important de le manifester par des gestes vrais et simples. Le téléphone et son bon usage en font partie. Gabriel, l’archange, ne nous en voudra pas. Je crois même que c’est lui qui nous pousse à téléphoner : il n’est pas au chômage !


Allo ! … Bonjour, … je vous écoute.

De jour en jour, en raison de la pandémie, les sites d’écoute téléphonique se multiplient. Conseils médicaux, renseignements pédagogiques, informations de l’Éducation nationale …. L’Église de France a ouvert un N° vert d’appel : 0806 700 772…Le diocèse de Paris également pour « Écoute Spirituelle : 01 78 91 91 78 »  

            Ces jours-ci, il m’est arrivé à diverses reprises d’entendre la personne que j’appelais par téléphone me dire : « Ah, merci pour votre appel, la journée sera moins longue ! »  ou bien   « Cet appel coupe bien mon après-midi. » Cela signifie que de nombreuses personnes ne parlent quasiment pas de toute la sainte journée : la solitude est dure pour beaucoup.            Une cousine éloignée qui habite de l’autre coté de la France, un voisin de l’étage du dessus – je le voyais tous les jours et nous avions l’habitude de tailler une petite bavette – et depuis 3 semaines « rien ». Un collègue qui a attrapé cette fichue bestiole, des amis dont je suis sans nouvelles. Autant et autant de personnes  qui sans le savoir aimeraient bien recevoir un rayon de soleil.

            Les numéros d’appel sont précieux car tous peuvent les utiliser, y compris de manière anonyme, discrète. Cela demande de l’organisation et une dépense pour les organisateurs, du temps et de la disponibilité pour les écoutants ; mais souvent, quel bonheur d’entendre que votre correspondant retrouve un peu de détente, que l’on sent dans sa voix s’esquisser un sourire. C’est un temps de présence qui rassure.

            Ce bonheur réciproque, nous pouvons l’éprouver par ces gestes simples, du téléphone, des courses pour un voisin, d’une simple carte envoyée (eh oui, la Poste fonctionne !) d’un bonjour qui s’envole dans la rue. Amour et fraternité ne coûtent rien : juste un cœur en éveil.


Soupe … et … Gâteau au chocolat

Ce n’était pas prévu : elle est arrivée comme une apparition, et nous ne sommes pas à Lourdes. Elle portait un sac à provisions et son visage était éclairé d’un grand et discret sourire. Puis, elle a simplement ajouté « Je vous apporte de la soupe et la moitié du gâteau au chocolat que j’ai fait pour la maison. » Au déjeuner, en communauté, nous nous sommes régalés, en pensant que, prêtres de Saint Médard, nous avions beaucoup de chance et surtout que des paroissiens délicats, attentifs et efficaces veillaient sur nous. A travers eux, c’est un clin d’œil qui vient d’en haut !

De quoi s’agit-il ? D’acheter des légumes, de les éplucher, les faire cuire, les mouliner et de réaliser le potage. Mais aussi de se procurer du chocolat, de le faire fondre, d’ajouter du beurre et tout ce qui est nécessaire  (secret de fabrication)  et de mettre au four. Mais si on fait tout cela avec un visage fermé et en faisant la grimace, on est quasiment sûr que quelque chose sera raté, sans doute du côté de l’essentiel.

Permettez une devinette : « qu’est-ce qui est le meilleur ? » La soupe, le gâteau au chocolat ou le sourire ?
La soupe a été faite avec attention, délicatesse et savoir faire.
Le gâteau, avec du chocolat et du grand art.
Le sourire le plus simplement du monde, dévoilant le fond du cœur.

Je ne répondrai pas à la question, chacun ayant sa propre réponse. En revanche, n’y a-t-il pas une manière du Saint Esprit, l’Esprit d’Amour, d’être présent en celui qui épluche les légumes en pensant à ceux qui tout à l’heure mangeront la soupe ? Ou encore dans le cœur mis à l’ouvrage pour ce gâteau qui va être partagé ? et, bien sûr dans le sourire  qui éclaire le visage de celle qui arrive et de celui qui reçoit !

 


Quelle horreur cette comptabilité !

            Chaque jour nous est livrée une terrible comptabilité ; elle nous fascine et nous l’attendons. Elle concerne tel ou tel continent, tel pays ou telle région, et c’est tout juste s’il n’y a pas des « Premiers Prix et des accessits ». Auparavant, nombre personnes se contentaient de voir combien il y avait de gagnants au Loto ou à My Million. Cela a commencé avec les accidents de la route, puis lors des attentats et du décompte des victimes, a suivi l’élimination de terroristes…

            Il est vrai qu’il faut bien faire des comptes et que c’est même indispensable pour venir à bout de cette fichue crise du Covid19. Mais nous risquons simplement d’oublier que chaque décès est lié à un prénom, un visage, une histoire, une famille et un écheveau de relations amicales et professionnelles : Jacques, Pauline, Fatima, Oscar, Noémie, Christiane, David, Mustapha, Esther, David, Juliette…Abraham a été invité à compter les étoiles, le Petit Prince comptait les astéroïdes, le Paris-Saint Germain compte les buts marqués et les encaissés … et nous, que comptons-nous ?

            Le travail des médecins de toute discipline, des infirmières et des soignants, du personnel de toute catégorie est formidable. Celui des caissières, des manutentionnaires nous est indispensable et plein d’abnégation : eux tous sont en contact avec des personnes concrètes réelles, pas avec des abstractions.

            Alors, nous-mêmes, puissions-nous ne pas nous déshumaniser. D’ailleurs autour de nous tellement de personnes sont touchées par des malades proches, des amis décédés, des personnes âgées totalement isolées. …Ayons un cœur comme celui du Seigneur : lorsqu’une de ses brebis s’est perdue, égarée, ne se met-il pas en route pour la chercher et la retrouver, l’appeler par son NOM, la soigner et la ramener sous son toit. Par Isaïe, ne nous disait-il pas : Tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et je t’aime. Is.43/4 …. Ton nom est gravé dans la paume de ma main. Is.49/16 »


Dans le silence : Marie debout

            Nous ne savons pas grand chose d’elle si ce n’est qu’elle est de Nazareth. Elle a reçu mission de mettre au monde Celui qui apporte la vie à l’humanité ; il naîtra à Bethléem. Pendant sa grossesse elle passe trois mois chez Zacharie et Elizabeth. On nous parle d’un pèlerinage à Jérusalem 12 ans plus tard, et encore vingt ans plus tard, de sa présence lors d’un mariage à Cana. Par deux fois elle dit trois mots à Jésus. Plus tard, on nous dira qu’elle désirait lui parler. Enfin, nous retrouvons Marie avec Jean et quelques femmes, au pied de la croix ; mais là, il n’y a pas une parole.             Pour 35 ans de vie, cela ne fait pas beaucoup !

La vie de la plupart sur la terre n’est-elle pas ainsi ! Marie a épousé cette vie, sans chercher davantage, mais en étant présente à ce que Dieu aime et à ce qui lui a été demandé : que voulez-vous de plus ? En ce temps de la Passion, Marie est là, douloureuse et discrète ; seul Saint Jean nous parle de sa présence au pied de la croix et de ce Jésus lui dit.

            En ce temps d’épidémie et de tant de douleur dans les familles, Marie est là, présente, attentive, sans paroles inutiles. Oui, présente avec discrétion et délicatesse, dans cette manière d’être que nous aimons chez nos proches, lorsque nous vivons un deuil. Il y a des présences qui révèlent et portent une Espérance et qui la transmettent autour d’elles, on ne sait comment, mais c’est ainsi.

            Marie fait partie de ces femmes qui sont habitées par une lumière à la fois discrète et chaleureuse. Sa seule présence peut nous faire habiter la paix et prendre un chemin éclairé par l’Espérance.


2,   3,    5,    8 … priants …

Chaque jour, prêtres, nous concélébrons la messe, sans présence de laïcs et toutes portes fermées pour respecter les règles du confinement. C’est un peu un contresens car toute messe est avec et pour le peuple de Dieu et pour toute l’humanité. Il est vrai qu’alors cela nous amène à avoir une prière encore plus ouverte à tout le quartier, aux isolés, aux malades, et au monde. Dés la fin de la messe, nous ouvrons les portes en grand et elles le demeurent jusqu’au soir, 19 heures.

Chaque fois que nous passons ou que nous venons pour un temps de prière silencieuse, il y a toujours, 2, 3, 5, … 8,… personnes qui prient. Elles sont à distance, aux quatre coins de l’église. Que se passe-t-il dans leur tête et dans leur cœur ? C’est leur secret et celui du Seigneur, pas le mien. Mais à chaque fois, je suis très impressionné. L’un reste quelques minutes, d’autres une demi-heure, voire une heure. Certains passent, mettent un cierge à brûler : « Seigneur éclaire ma vie » – « Que cette prière soit comme la flamme de ce cierge : qu’elle éclaire et réchauffe…Que cette prière pour le monde dure aussi longtemps que brûle ce cierge…Seigneur éclaire et réchauffe le lien et l’affection dans ma famille. » Des personnes font simplement le tour de l’église, regardent les tableaux, les vitraux et toujours avec discrétion et grand respect.

Oui, c’est impressionnant et plein de sens. L’Église, peuple de Dieu, est ouverte à tous. En son sein la plupart agissent là où ils sont, sans se mettre en valeur, mais en vérité. Beaucoup prient de mille et une manières, chez eux, dans les trajets, à l’église … La prière est comme la pluie qui tombe sur les graines semées et qui fait pousser. Elle ouvre une place au Seigneur au milieu du peuple des hommes, 7 ou 8 milliards sur la terre, tout comme dans les rames de métro surchargées de voyageurs aux heures de pointe.     Alors, NOUS AUSSI : Osons prier !…


Eh oui … c’est vraiment Pâques !

« Je sais que vous cherchez Jésus le crucifié… » Matthieu 28,5
« Au matin de Pâques, les femmes allèrent acheter des aromates pour l’ensevelir  … elles s’enfuir et  ne dirent rien à personne » Marc 16,1, 8
« Les femmes revinrent du tombeau et rapportèrent aux Apôtres ce qu’elles avait vu… mais ces paroles leur parurent un délire et ils ne les croyaient pas. » Luc 24,9, 11
« … esprits sans intelligence, cœur lents à croire » Luc 24, 25
« Si je ne vois pas dans ses mains les traces des clous : je ne croirai pas » Jean 20,25

Au moins, un point est sûr et les témoignages sont concordants : les disciples n’étaient pas prêts à croire à la résurrection de Jésus. Témoins de sa mort, enfoncés dans le deuil et le chagrin, il n’y avait plus que cela : l’échec et la mort. Combien nous les comprenons, car la peine peut assombrir l’espérance et la mort ensevelir notre foi. Le temps actuel de pandémie et le nombre astronomique de malades et de décès, nous poussent en ce sens.

Pourtant Jésus est vivant, ressuscité. Il s’est montré, a parlé, a partagé des repas avec les disciples qui l’ont reconnu et lui ont donné leur foi. Puis il les a envoyés de par le monde et ils sont devenus des témoins actifs, extraordinaires : chrétiens d’aujourd’hui, c’est grâce à eux que nous sommes là !

Je suis marqué par des témoignages d’amis qui ont perdu un proche, conjoint, parent âgé, ami de longue date …  Et la plupart parmi nous connaissent ces deuils. Chrétiens, nous vivons les mêmes deuils, les mêmes désespoirs et les mêmes souffrances que beaucoup. Mais un cadeau prodigieux nous a été fait. Depuis la pâque de Jésus, au milieu des crises et des coups de boutoir de toutes sortes, nous sommes debout dans l’Espérance, enracinés dans la foi, même si nous savons que nous sommes fragiles et faillibles. Notre force est celle du Christ Jésus debout, vivant ressuscité !


Pâques et le chocolat

Oui, c’est l’année où jamais de manger des chocolats de Pâques ; et je ne me moque pas. La terre entière est en souffrance, certains n’ont pas d’espérance mais un nombre incalculable de personnes se battent contre ce fichu virus. Nous les en remercions. Nous avons besoin de force. Chrétiens, nous vivons dès aujourd’hui de l’amour de Jésus le Seigneur. Cet amour est debout et vivant depuis sa Pâque, et il aura le dernier mot ! Il nous demande pour cela de nous servir de tout ce que l’intelligence de l’homme, son cœur, sa ténacité, la force de son espérance lui donnent, pour combattre et vaincre. Le Seigneur ne fait pas les choses sans nous, il les fait avec nous.

Aussi, dans la lutte et les combats actuels de toutes sortes, il nous invite à vivre avec joie, humour, solidarité, amitié. Et c’est là que le chocolat est le bienvenu ! Un peu de gourmandise est bien utile, mais une gourmandise qui partage, qui se lèche les babines et sait rire aux éclats quand les voisins font de même. De plus le magnésium donne du tonus : alors allons-y, sans friser la crise de foie. Nous avons à agir avec le plus grand sérieux, mais par pitié, pas à nous prendre au sérieux. Dans ce combat de chaque instant, les personnes qui savent garder sourire, joie et humour nous sont tellement précieuses : elles nous aident, nous aussi à continuer, l’un dans le confinement, l’autre dans le service, l’autre encore dans la maladie ou dans les soins apportés …

Alors, si sur votre chemin vous croisez un œuf de Pâques ou même une boîte de chocolat : vite, invitez-les à rejoindre votre panier et, plus vite encore, allez les partager avec ceux que vous rencontrerez.


Le jardinier, la merlette et les oisillons.

Imaginez un prêtre de saint Médard, debout sur une échelle, à 50 centimètres du nid des merles de notre jardin. Et voilà qu’il converse avec les oisillons becs grands ouverts dans la l’attente de leur pitance. La merlette en revenant, chargée de nourriture pour ses petits, a failli donner la becquée au Révérend ! Là se mélangent, me semble-t-il, la faim, le désir, l’apprivoisement, résultat d’une proximité quotidienne sans heurts ni précipitation. Les merles, le rouge-gorge, les mésanges se sont habitués à celui qui n’est pas un épouvantail mais un amoureux de la terre et des fleurs.

Ne serions-nous pas tous en train de vivre cet apprivoisement. Une proximité de destin nous lie les uns aux autres. Des parents courent pour nourrir leur famille et en même temps rapportent pour les voisins âgés ce qui leur manquait pour leur repas. D’autres se donnent des tuyaux pour réussir, dans le confinement, des exercices physiques ou encore pour se dépanner quand surviennent les bugs informatiques : le télé-travail s’impose ainsi que les devoirs des enfants. L’entraide et la solidarité deviennent bien réelles. Mais il y a plus profond et c’est presque indicible. Quel est ce désir de sens qui nous habite et ce danger de non sens qui nous guette ? Certes, la télévision peut faire écran et endormir notre questionnement… Et pourtant ce dernier revient et s’ancre profondément en nous. Nombreux, ne commencerions-nous pas à voir le monde et la vie un peu autrement, car il va s’agir de reconstruire et de vivre.

Tels les oisillons qui piaillent en réclamant la becquée, voyons qui peut nous la donner et marcher avec nous au long des jours. Jésus est resté 40 jours dans le désert pour se mettre devant Celui de qui tout vient et donne sens à toute chose. Désormais ressuscité il nous montre le chemin.


Rêves...

Ce chemin de montagne sous le soleil avec seulement le chant du vent, le cris des marmottes, les fleurs innombrables, petites gentianes bleues et grandes jaunes, renoncules blanches et jaunes, pensées bleues et blanches, massifs d’épilobes violettes et tant d’autres : tout un horizon de beauté et de liberté.

Nos aînés, nombreux dans les Ehpad ou dans de petits logements, soupirent après les visites de leurs enfants et petits enfants, mais aussi des voisins de la pièce d’à coté. Les enfants voudraient retrouver leurs copains, les maîtresses de leur école, la classe et les jeux à la récré. Adultes, nous aimerions être délivrés des appréhensions de toutes sortes, retrouver nos responsabilités, nos relations et nos amis. Et tous ces désirs que chacun porte dans ses souhaits et ses rêves. Pourquoi ?

Nos cœurs ne sont pas faits pour être confinés, non plus que nos relations, responsabilités ou perspectives. Aujourd’hui, que nous le voulions ou non, notre horizon est celui du monde : tous ses continents, les peuples si divers, les pays posés sur la sphère de la terre, comme en un gigantesque puzzle. Tout cela c’est : « chez nous,  notre Maison commune. » Et voilà que nous nous échappons et vivons en notre Maison commune, nous l’écoutons, pensons à elle. Déjà, nous ne sommes plus seuls. Croyants, chrétiens et fidèles de toute religion, nous vivons avec tous et nous déposons la vie de la Maison Commune  dans les mains de Celui qui en est la source et l’âme à chaque instant, aujourd’hui comme toujours.

C’est là que nos rêves et tous les rêves prennent corps et deviennent réalités en les confiant à Celui dont les mains travaillent avec les nôtres  et dont le cœur bat en notre cœur.


Désir et Réalité

Ce dimanche, 2ème pascal, dimanche de la Miséricorde que nous aimions appeler « dimanche de Quasimodo » souvenir de l’antienne grégorienne, mais aussi de Victor Hugo … ce dimanche nous verra très nombreux devant la télévision à 10h30 pour Le jour du Seigneur, puis à 11h00 pour la messe télévisée. Depuis 70 ans l’équipe qui produit cette émission religieuse fait un travail formidable. Ces temps-ci, son audience a triplé. KTO, mais aussi RCF, Radio Notre Dame et bien d’autres, font un travail de très grande qualité. Tout au long de ce confinement, et déjà bien avant, nous en apprécions la présence, le professionnalisme, l’expression de foi. Lors des messes nous sommes profondément soutenus par ces médias et nous unissons notre prière à celle de millions de croyants qui font de même. Mais pendant la communion que faisons-nous ?

« Ah Seigneur, j’aimerais bien te recevoir comme lorsque j’étais à la paroisse ! …  Je vois l’hostie sur l’écran de la télé, mais tu n’es pas vraiment présent en moi par la communion. … Nous sommes des millions à désirer ta présence dans le sacrement et nous ne pouvons pas te recevoir… » Tout cela nous l’entendons aujourd’hui, mais combien de personnes très âgées ou malades ne pouvant se déplacer l’éprouvent-elles depuis des dizaines d’années ? Il y a aussi des régions entières du globe où aucun prêtre ne peut aller chaque dimanche pour célébrer.

Est-ce un découragement qui s’installe en nous ou un désir qui creuse dans notre vie une place pour le Seigneur ? Parisiens, nous avons la chance extraordinaire d’être entourés d’églises où plusieurs messes sont célébrées chaque dimanche. L’habitude, presque la routine, pourrait s’installer en nous. Ce temps d’absence de messe peut nous réveiller et aussi nous faire rejoindre par la prière tous ceux qui n’ont jamais de messe ici et ailleurs dans le monde. Et cette absence nous faire désirer encore davantage la présence du Seigneur dans le monde, dans nos vies et pour toujours.


Vivre dans la confiance…ou non

Depuis l’annonce que le 11 mai sera le jour de la fin du confinement général, mais que pour les aînés il faudrait éventuellement attendre davantage, affirmations, mises au point et démentis se succèdent : que et qui croire ? Les fausses nouvelles se répandent depuis très longtemps, les réseaux sociaux pouvant leur servir de vecteurs et de bases de lancement, les confidences entre amis et voisins pouvant faire le reste. Et comme des gens malveillants et malhonnêtes vendent de faux médicaments par internet, certains parmi nous ne savent plus à quel saint se vouer ! La confiance a-t-elle encore une place aujourd’hui ? Pourtant nous apprécions les chercheurs, scientifiques, politiques qui nous disent ce qu’ils connaissent vraiment et ce qu’ils ignorent, ainsi que leurs sujets de recherche et d’expérimentation. En revanche les divagations idéologiques de certains chefs d’état, faites en raison d’idées individuelles ou de pression de groupes d’influence, peuvent engendrer des catastrophes et ruiner la confiance.

Les applaudissements de 20h00 nous disent tous les soirs la confiance faite aux soignants de tous niveaux, ainsi qu’aux personnels de service de toute l’échelle de la société. L’humilité et la ténacité des chercheurs et l’écoute réciproque inter disciplinaire nous rassurent sur la qualité de leur travail. Mais il y a aussi le quotidien le plus simple. Dans la rue, beaucoup de personnes gardent leurs distances, savent s’arrêter pour laisser passer. Devant les magasins les queues disciplinées ne rassemblent pas que des grincheux : attitude bon enfant, humour, sourire et même entraide révèlent une attention réelle aux autres, connus et inconnus.

Humainement, spirituellement, nous ne pouvons pas vivre sans habiter la confiance. Depuis Abraham, il y a 3800 ans, elle est la clé de l’alliance entre le Seigneur et les hommes. Jésus l’a portée à son sommet. Dans la vie quotidienne, et tout spécialement en cette période difficile, même si certains jours elle ne semble pas évidente, la confiance est essentielle.  Ne laissons pas la vie la dissoudre ou même l’égratigner.


La Cuisine du Presbytère

Ces derniers temps, les prêtres de saint Médard investissent la cuisine à tour de rôle et chacun à sa manière. Déjeunant ensemble nous découvrons différents talents culinaires, et bien d’autres choses. Ainsi : l’état de la cuisine avant, pendant et après le repas, la manière de mettre la table et d’agencer le menu, la spécialité du ‘chef’ du jour… Voilà une poudre magique se transformant en un flanc pas tellement caoutchouteux. Un autre a découvert les rouleaux de pâte à tarte et quiche, dont la cuisson oscille entre le cru et le trop grillé. Tel a décerné aux magasins Picard la médaille de « sauveur de l’humanité confinée »…. Et j’en passe ! Ceux d’entre nous qui n’avaient pas tellement de dévotion aux anges ont pu évoluer : l’arrivée, le jour de Pâques, d’un plateau de fromages ou d’une bouteille de vin de qualité, de fraises de Bretagne, quand ce n’était pas une généreuse soupe de légumes, a été un signe déterminant. Des anges terrestres ayant deux yeux, deux bras et un cœur s’occupaient de nous.

Sherlock Holmes s’est mis en chasse et a bientôt découvert qu’il y avait de singulières ressemblances entre  ces anges terrestres et ceux qui, chaque matin, allaient chercher des « sacs-repas » et en distribuaient à midi quelque 50 à 70, devant l’église et aussi en maraude.

Nous parlons beaucoup de pandémie, d’épidémie, de contagion et autres … Ces temps-ci, n’y aurait-il pas mille et une occasions de découvrir une heureuse contagion. Voici que dans la vie de tant de personnes et dans la nôtre même, se révèlent des trésors inconnus, des ressorts et des capacités jusqu’alors en gestation, en même temps qu’une générosité disponible et désirant s’exprimer.


Sac bleu et café noir

Bientôt les Jeux Olympiques : certains s’entraînent pour la course de relais ! Paris — Rungis — les Grossistes — Collège Stanislas — Saint Médard et des dizaines d’autres paroisses — le parvis devant l’église — 95 personnes entre 12 et 13 heure— et maraude — retour chacun sur son lieu — bon appétit — rangement par les bénévoles —

Et quoi au menu ? Bonjour chaleureux et sourire,  des accueillants et accueillis…Voulez-vous un café ? oui, presque toujours. Sac bleu : conserves et boîte de  sardines, salade, pain, fromage, dessert, jus de fruit, couverts et serviette en papier, une bouteille  d’eau ou de thé. Le menu change avec ce que les grossistes ont donné. Merci pour leur générosité ! Quelques personnes accueillies restent pour parler un peu. La parole est tellement importante et parfois « silence et solitude » sont le menu principal de toute la journée. Aussi une halte où pain et parole sont présents, c’est un peu d’humanité et de lien, même si le passage est bien rapide. Beaucoup de personnes sans domicile ne s’attardent pas de manière à retrouver le lieu où elles ont un peu de sécurité.

Il y a les bénévoles qui se relaient depuis cinq semaines et ont encore de beaux jours devant eux. L’entrain ne faiblit pas et tous les âges sont là. A dire vrai, pas le mien, car il nous a été gentiment dit que nous étions trop fragiles : Merci Docteur-Archevêque ! En voyant tout cela, ce qui me plait, c’est la joie active, l’efficacité, l’humanité souriante sans que personne ne se pousse du coude ou se mette en valeur.

Et si ce fichu virus nous avait apprenait la joie de servir sans se faire mousser !


J’en ai marre : c’est trop long !

Oh oui : nous sommes 67 millions en France  et plusieurs milliards dans le monde à le penser : les marins partis  pendant 4 ou 6 mois sans revoir leur famille, les femmes enceintes qui au 5ème mois disent « encore 4 mois. », les personnes âgées sans visite depuis des semaines, les militaires en opération au Sahel ou ailleurs dans le monde, les enfants et les adultes sous-alimentés en raison de la sécheresse, les chercheurs d’un vaccin contre le virus et d’autres fléaux…Et tant d’autres. 

Des souvenirs me reviennent. Le passage de l’infirmière au milieu de cette nuit trop longue à l’hôpital. La relève de la garde pendant le service militaire alors que le temps était glacial. L’arrivée du ‘Nord-Atlas’, avion d’évacuation sanitaire vers la France. La distribution des prix qui nous ouvrait sur 2 à 3 mois de vacances que nous appelions « grandes vacances ». Mais aussi la guérison d’une personnes chère.

Aujourd’hui, nous en avons assez ! Je pense, néanmoins, que dans ce contexte  nous avons quelque chose à faire de cette lassitude. Parfois, il est bon de se servir de notre adrénaline et de la  mettre au service de l’action, plutôt que de la laisser détruire autrui et nous-même, puis nous annihiler. Nous avons vu se transformer beaucoup de comportements. Si certains se sont refermés, beaucoup au contraire sont sortis d’eux-mêmes, ont vécu une plus grande attention à autrui et souvent une très belle entraide : téléphones, courses pour des voisins, services divers dans le voisinage et aussi pour des personnes sans domicile.

« Le Seigneur entend ceux qui l’appellent : de toutes leurs angoisses il les délivre. Il est proche du cœur brisé ; il sauve l’esprit abattu » dit le Psaume 33. Malgré la lassitude, puissions-nous trouver le ressort dynamique et souriant, l’attention aux autres et le service, toutes choses indispensables aujourd’hui et qui nous sortiront aussi de nous- mêmes.


Son déjeuner … !

C’était il y a quatre ou cinq jours, un peu après 13heures. La file des 95 personnes venant chercher un sac repas avait disparue, de même que les 95 repas. L’équipe des bénévoles rangeait le matériel. Arrive une femme un peu perdue : elle demande un de ces sacs-déjeuners, mais il n’y en a plus ! On voit alors le visage désolé des bénévoles et un début de panique chez la femme. Un homme arrive alors : nous le connaissons bien. Tous les jours, il est là, assis, adossé au mur voisin, entouré d’un capharnaüm indescriptible. Souvent il interpelle les passants dans un sabir incompréhensible, sans doute un  dialecte issu de la péninsule ibérique et connu de lui seul. Il ne ferait pas de mal à une mouche et c’est maintenant une figure de ce petit bout de place du bas de la rue Mouffetard. Il tient dans sa main son sac-déjeuner, et le plus simplement du monde le remet à la femme qui n’en croit pas ses yeux. Son visage change, le sourire lui revient et elle repart le visage détendu, souriant.

Dans la foulée, il n’y  pas eu de conférence de presse, ni d’interpellation à l’Assemblée Nationale, pas d’attroupement rue Mouffetard ou d’applaudissement aux fenêtres. Même les pigeons qui glanent leur pitance sur le pavement du trottoir n’ont émis aucun roucoulement approbateur. D’ailleurs, qui a vu ce geste discret ? Uniquement quelques bénévoles qui rangeaient le matériel… et cela suffit !

Quelques jours avant sa Pâque, Jésus regardait le Temple. Il vit une pauvre veuve qui mettait deux petites pièces dans le tronc et il dit : « Cette pauvre veuve a mis plus que tous les autres  …. Elle a pris sur sa misère pour mettre tout ce qu’elle avait pour vivre. » (Evangile de Luc 21/1-4) Qui donc verra ces pépites de vie, ces clins d’œil fraternels, ces parfums d’amour vrai ? Qui, sous les blessures de la vie et les visages marqués d’échecs et de peine, découvrira ces cœurs ouverts et disponibles, prêts à donner beaucoup et à recevoir un peu d’amour et d’humanité ?


Lisez donc un Evangile !

Mais quel rapport cela peut-il avoir avec le covid 19 ?  Aider son voisin, distribuer des repas, téléphoner aux personnes seules ou à celles qui n’ont pas le moral, et tant d’autres choses … je comprendrais. Mais lire un évangile, à quoi cela rime-t-il actuellement ? J’allais dire : « Lisez le, nous verrons après ! ». Mais tout simplement, n’est-ce pas là que nous voyons Jésus agir, écouter, redonner confiance et remettre en route tant et tant de personnes, et même, tout donner pour nous. Cela doit bien avoir un sens aujourd’hui où dans l’absurdité et le désastre du covid, nous cherchons un sens à notre vie tout en hésitant pour savoir ce que nous devons faire.

Alors, « en avant » ! Ouvrez votre armoire, votre bibliothèque, cherchez dans le monceau de livres accumulés depuis des décennies, allez à la cave et cherchez. Je suis sûr que vous avez un livre des quatre évangiles, ou un Nouveau Testament, voire une bible. Prenez ce que vous aurez trouvé. Si vous n’avez rien, demandez à vos voisins, ou en famille, ou même à la paroisse. Prenez le livre, soufflez dessus pour faire envoler la poussière : vous avez en main le petit trésor que vous cherchiez mais dont vous aviez peut-être oublié la présence.

Et maintenant, il va s’agir de lire ! Calez vous bien dans un bon fauteuil. Je vous conseille une première lecture. Choisissez l’un des quatre évangiles, celui que vous voulez. Saint Marc, le plus court. Saint Luc, le plus exigeant et le plus miséricordieux. Saint Matthieu, plus organisé, plus ecclésial. Saint Jean, plus théologique et spirituel mais plus difficile. Bref, celui que vous voulez. Et essayez de le lire d’une traite, sans vous arrêter en ne lisant ni les notes, ni les explications, vite, de manière à avoir une vue d’ensemble et une impression générale. Les jours et les semaines suivants, vous reprendrez passage par passage, en prenant votre temps, avec les notes, en méditant, et contemplant la scène, Jésus, les autres personnes en jeu et sans doute en priant à votre manière. A dose homéopathique chaque jour et de manière continue. Si vous le voulez, nous en reparlerons. Bonne lecture.


L’étage panoramique : l’eucharistie !

Beaucoup rêvent d’habiter un dernier étage, panoramique, et négligeraient bien tous les autres. Pourtant pour arriver au 56° étage de la Tour Montparnasse, il a bien fallu traverser tous les autres, au moins par l’ascenseur ou l’escalier. Des touristes pourraient même penser que ce dernier étage se suffit à lui-même : qu’importent les 55 autres et les sous-sols…Il n’y a pas que la Tour Montparnasse. Au risque d’être sévère, je me demande si un certain nombre de chrétiens n’habiteraient pas que l’étage panoramique de la vie de foi !

Qu’est-ce à dire ? Un adage affirme : « L’Eucharistie est la source et le sommet de la vie de foi. » Ce n’est pas moi qui le contredirais. Prêtres, quelles que soient nos limites et nos erreurs,  nous essayons de vivre quelque chose de cela. Un point m’étonne néanmoins : il a fallu attendre que Jésus ait quelque 35 ans, et passe trois ans avec ses disciples avant qu’il célèbre la Sainte Cène, l’Eucharistie. Auparavant, il a beaucoup enseigné, accueilli des personnes les plus diverses ; il a guéri et redonné confiance, force et espérance à beaucoup. Il s’est mis au service de tous, le lavement des pieds le Jeudi Saint nous le rappelle. Tout cela souligne que nous ne pouvons pas accéder à la messe et à la communion, en omettant tout le reste. Trop souvent nous l’oublions.

Les temps difficiles et frustrants que nous vivons pourraient bien nous éclairer. Les chrétiens ne peuvent pas communier et ils en souffrent vraiment. En revanche, beaucoup vivent une entraide toute simple et naturelle envers des voisins ou des personnes en difficulté. Nombreux ont redécouvert une prière plus personnelle mais unie à celle des croyants confinés. Un certain nombre lisent, réfléchissent pour structurer leur vie de foi.

En ce temps de covid19, il peut y avoir une grâce à devoir jeûner de l’Eucharistie : c’est paradoxal et certains penseront que mon propos est scandaleux. J’assume ! Redécouvrir que l’Eucharistie vient comme sommet de tout cela, et qu’elle nous pousse et nous projette dans l’action, la prière et l’approfondissement de la foi, pourrait être un très beau cadeau de cet affreux virus !


Fontaines de Paris

Vous les eaux par-dessus le ciel,
Vous toutes, pluies et rosées,
Et vous, sources et fontaines,
Bénissez le Seigneur, Bénissez le Seigneur. Livre de Daniel 3, 55…88

Nous les aimons les fontaines de Paris, qui sont si diverses : toute simple, entourée de fleurs au bas de la rue Mouffetard ; élégante, face à la Comédie Française ; malicieuse au parc Citroën ; romantique au Luxembourg le « Fontaine de Médicis » ; puissante au Jardin du Trocadéro ; majestueuse place Saint Sulpice ; et tant d’autres…Mais au fait, connaissez-vous les quatre personnages qui ornent les quatre cotés de la fontaine de Saint Sulpice? Quatre évêques : Bossuet, bien sûr ; un avec qui il a eu bien des disputes ; un oratorien évêque de Clermont ; un autre, grand prédicateur de son époque…. Qui sont-ils ?  

Revenons à nos chères fontaines : si belles, si diverses, mais sans eau ! Quel sens cela a-t-il ? Quelle tristesse ! Telles des corps sans vie, pétrifiés et rigides. Il y a un fautif : c’est un tout petit virus, mais il est légion ! C’est celui qui hante notre planète depuis quelques mois. Tout comme nos fontaines désirent le jaillissement d’une eau pure, nous avons hâte de retrouver une pleine liberté et l’épanouissement de nos vies. Ne serait-ce pas le cadeau de la Pentecôte ?  L’eau qui jaillit n’est-elle pas le symbole de l’Esprit qui donne vie. Nous l’attendons pour notre monde, pour les futurs baptisés, pour les peuples, l’Église et l’humanité. Oui, l’humanité a soif de la vie, la vraie, celle que donne l’Esprit Saint, même si elle ne connaît pas son nom.

En ces temps d’attente laissons se creuser en nous ce profond désir de vie et faisons la place à l’Esprit Saint que nous fêterons à la fin de ce mois de mai. Peut-être alors les fontaines de Paris auront-elles retrouvé les jaillissement d’eau pure que nous attendons.


Choisis la vie !

Qu’est-ce à dire ? « La fureur de vivre » « Viens on va s’éclater » « Qui veut voyager loin, ménage sa monture» « Respirons à pleins poumons » « Je n’ai qu’une vie, je ne veux pas la gâcher » « Quel que soit notre âge, ne vivons pas comme des momies » Avant de poursuivre, ne pourrions-nous pas essayer de trouver, inventer la phrase qui nous conviendrait le mieux pour répondre à cet appel : « Choisis la vie ! »

Cet appel a plus de 30 siècles. Il fait partie de ce que Dieu dit à Moïse à la fin de sa vie, à l’intention de son peuple : « Je te propose la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction. Choisis donc la vie pour que toi et ta postérité vous viviez. Dt 30,19 » Plus de 30 siècles, et cet appel n’a pas vieilli. Dans combien de régions, de pays, de villes, de villages, la maladie, le virus, la mort sont là à nous guetter. Dans ces mêmes lieux et ailleurs encore des myriades de personnes de toutes cultures et de tous styles agissent, cherchent, œuvrent pour faire reculer ces ennemis invisibles. Ces personnes choisissent la vie, quitte à donner leur vie pour que beaucoup la conservent.

Chacun de nous a-t-il entendu cet appel pressent transmis à Moïse pour les âges à venir ? Je n’en suis pas sûr ! Et moi-même, je peux me demander si vraiment je choisis la vie. Si nous n’en avions pas conscience auparavant, nous avons compris depuis quelques mois que nous sommes tous interdépendants, et que personne ne se sauvera tout seul ! Juste une question : le masque je le porte ‘pour moi ou pour les autres’, la distanciation je la respecte ’pour moi ou pour les autres’ ? C’est-à-dire : Pour qui est-ce que je choisis la vie ?

Sans scrupule, mais vraiment, regardons  ce que sont les différents actes de notre quotidien et les orientations de notre vie. Font-ils grandir la vie ou l’écornent-ils ? Au service de qui et de quelle vie existent-ils ? Avons-nous vraiment entendu : « Choisis donc la vie, pour que toi et ta postérité vous viviez. »


Attendre …!

Lundi, le coiffeur m’a donné un rendez-vous pour ce samedi à 15 heures ; j’étais présent à l’heure et à 15h15 ou 20 je suis revenu chez moi. Une femme avec qui j’échangeais me disait la semaine dernière : j’aurai un rendez-vous à la mi-juin… je n’ai pas osé sourire ! Mais je ne peux pas m’imaginer avec une charlotte, sous le casque, puis attendre que la teinture sèche et pourquoi pas avec des bigoudis et autres objets de torture sur le crane. Évidemment, je suis toujours prêt à taquiner mes amies sur ce genre de sujet, et j’aurais bien tort de m’en priver : Oui, bien sûr ! Mais la question est-elle là ? Qu’importe la charlotte, la teinture, le casque et tout le reste … Mais « attendre ». Est-ce que je sais attendre ?

Beaucoup parmi nous ont été attendus plusieurs années avant leur naissance, et tous, environ 9 mois au sein de leur mère. Les anciens se souviennent avec émotion de la longue attente des fiançailles où il n’était pas question d’habiter l’un chez l’autre. Quant aux promotions professionnelles, elles n’arrivaient pas par un claquement de doigt  – aujourd’hui non plus. Une longue attente : 18 siècles entre Abraham et le Christ ; tel, prisonnier 5 ans pendant la dernière guerre ; en Ehpad, deux mois et demi avant de retrouver le visage de ses enfants et pour ces derniers, la présence de leurs parents âgés. Chacun peut continuer cette énumération.

Mais au fond, qu’est-ce que j’attends ? Ou plutôt, en regardant ma vie et celle des uns et des autres, nous allons d’attente en attente, sans jamais  être comblés. Saint Augustin a vécu ce manque : « Où étais-je, moi, quand je te cherchais ? Toi Seigneur, tu étais devant moi ; mais moi j’étais parti loin de moi et ne me trouvais plus moi-même, moins encore, ô combien, toi-même !… Tu étais au-dedans et moi dehors et c’est là que je te cherchais. Tu étais avec moi et je n’étais pas avec toi. » Alors Augustin comprend : « Tu nous as faits pour toi Seigneur et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en toi »


Bas les Masques !

Serions-nous au carnaval de Venise ? Non, pas du tout ! Peut-être alors au cœur d’un western ? Pas davantage. Ou encore devant une scène de théâtre où des enfants jouent aux gendarmes et aux voleurs ? Je ne crois pas ! Nous sommes en période de pandémie, espérant bien arriver au plein déconfinement : alors, les mesures de protection et de distanciation seront abolies. Car le temps s’étire et à présent nous le trouvons pesant. Nous sommes de dizaines de millions en France et des centaines de millions ailleurs, sur tous les continents, à éprouver cette pesanteur. Bon gré, mal gré, nous voilà solidaires de toute l’humanité tant dans la gène que dans l’Espérance. Nous avons hâte de jeter les masques, mais plus encore de savoir les uns et les autres libérés de la gène et surtout de la peur, du désarroi et du chômage, souvent de la faim et bien sûr de la maladie.

Au moment où nous voyons l’horizon commencer à s’éclaircir, nous nous préparons à la Pentecôte. L’Esprit de Dieu, Esprit de vie et d’amour, y est donné à l’Église, au monde, à chacun. Nous allons pouvoir revenir à la messe, fêter et recevoir l’Eucharistie, le Corps du Christ ; et c’est un bonheur. Mais attention : le Christ n’est pas « mon Jésus, à moi ». Il est « Le Seigneur» siégeant à la droite du Père, comme nous le fêtions au jour de l’Ascension. Oui, il a envoyé l’Esprit Saint pour le monde entier, ainsi que pour chacun, vous, moi, au sein de ce monde et pas en dehors ou à côté de ce monde

En ce temps de pandémie, plus que jamais le monde a besoin de l’Esprit Saint pour vivre la solidarité et l’entraide. Et nous-mêmes, nous avons besoin de l’Eucharistie pour qu’elle fasse de ce monde l’unique Corps du Christ. Ce n’est donc pas le moment, par individualisme ou dégoût, de jeter nos masques. Dans l’esprit de la Pentecôte, il est au contraire nécessaire de conserver tous les gestes qui peuvent aider l’humanité blessée à guérir et à vivre.


Jeu de Piste : la Case au Trésor, l’Esprit Saint

Vous avez lu les Actes des Apôtres ou du moins un certain nombre de passages du livre. C’est un vrai jeu de piste : départ « Jérusalem », arrivée : « Rome ». C’est-à-dire que le récit commence à l’Ascension de Jésus et à la Pentecôte pour se  poursuivre jusqu’au moment où Paul s’adresse aux païens de la capitale du monde connu de l’époque. Entre les deux : des voyages, des découvertes, des embûches, emprisonnements et autres. Et surtout, le début de nombreuses communautés chrétiennes au fur et à mesure des voyages et des missions. Humainement, rien de tout cela n’aurait pu tenir debout et perdurer : il a vraiment fallu qu’Un Autre s’en mêle !  Qui ?

Saint Luc, dans ce récit, fait une relecture de ce début de l’histoire de l’Église : certains ont appelé ce livre « l’Evangile de l’Esprit Saint » Je ne sais pas si cette appellation est canonique, mais elle me plaît et elle me parle. Dans ces quelque 30 premières années de la vie de l’église, l’Esprit Saint a été celui qui a donné souffle et force, amour et vie à ces hommes envoyés par le Seigneur et à ceux qui, de ville en ville, sont devenus les disciples de Jésus et ont constitué l’Église.

C’était il y a 20 siècles et nous sommes aujourd’hui en 2020. Dans un contexte différent et avec d’autres rythmes de vie, continuons à faire cette relecture de la vie de l’église, et aussi de notre vie personnelle. L’Esprit Saint n’est pas aux abonnés absents. Même si nous n’y faisons pas attention, il est là. Même s’il y a eu des égoïsmes et des irresponsabilités, regardons l’immense courant d’entraide, de service, d’amour discret et efficace qui s’est manifesté depuis plus de deux mois à l’occasion de la pandémie. Ces deux mois nous ont également permis de ressaisir ce qui a eu du sens au long de notre vie, ce que nous voulons garder envers et contre tout comme un trésor caché, comme une perle de grand prix (Mt 13/44-46). Et si nous n’y avons pas beaucoup pensé, à présent prenons le temps qui convient pour le faire. Nous y découvrirons beaucoup de trésors et des convictions pour vivre aujourd’hui et demain.


Des dons à foison, une véritable pandémie : la Pentecôte

Au jour de la Pentecôte à Jérusalem, ce furent des dons à foison qui vinrent sur la foule. Elle venait de beaucoup de pays, les langues étaient diverses et chacun comprenait dans sa propre langue. Aujourd’hui, alors que nous nous battons contre le covid19 et voulons vaincre la pandémie, nous avons besoin des dons du Saint Esprit.

La SAGESSE : pour goûter la présence du Seigneur au sein de l’humanité qui souffre et espère : ne pas désespérer et avancer.
L’INTELLIGENCE : pour approfondir notre connaissance de la Parole de Dieu – ainsi «  aime ton prochain comme toi-même… ce que vous ferez au plus petit des miens, c’est à moi que vous les ferez … va et fais de même, comme le bon Samaritain… »
Le CONSEIL : se mettre à l écoute de la Parole de Dieu, exercer un discernement spirituel et agir à bon escient.
La FORCE : témoigner, envers et contre tout ; avec persévérance, rester        fidèle à l’Evangile. Dans la pandémie, c’est une grande exigence.
La CONNAISSANCE : elle permet de reconnaître Dieu à l’œuvre aujourd’hui, y compris dans les difficultés actuelles et les situations tragiques.
L’AFFECTION FILIALE (= piété) : Dieu, notre Père, l’aimer comme un père. Entrer dans l’expérience de la paternité divine, y compris quand le mal et les maux qui nous entourent et nous habitent, nous désarçonnent. Il est notre Père et nous sommes ses fils.
La CRAINTE DE DIEU : Le respect sans peur que nous vouons à Dieu quelles que soient les circonstances… et aujourd’hui, elles sont difficiles.

Plus que jamais il est bon et indispensable de prier l’Esprit Saint, de nous livrer au souffle de son amour et de sa vie, de les accueillir et les transmettre  autour de nous, sans prétention, mais avec cœur.